Camille Thomas,
l'émotion à l'état pur.
Elle parcourt les scènes du monde entier avec grâce pour interpréter les grands du répertoire classique. Camille Thomas est très connue des spécialistes pour son talent de violoncelliste. CulturActu a choisi de vous la présenter à l'occasion de la publication de son nouvel album "Voice of Hope" édité chez Deutsche Grammophon. Elle a répondu à nos questions en toute simplicité.
"Voice of Hope", c'est un album au titre prédestiné même si vous ne l'avez pas préparé au moment du confinement...
Cet album a été conçu autour de la pièce centrale, le concerto que Fazil Say a composé, d'une seule traite, pour moi. "Never give up" ("Ne jamais renoncer") est sa réponse en musique aux attentats du Bataclan et d'Istanbul dont il est ressorti, comme nous tous, profondément choqué. Un concerto comme une catharsis, un moyen de transcender la douleur, l'incompréhension avec le message qu'il ne faut jamais renoncer en l'homme et la beauté. Tout le concerto nous mène vers cette conclusion. Le violoncelle est comme une voix humaine racontant notre époque un peu comme un troubadour. Le second mouvement est composé de percussions, symbolisant le son des armes et le violoncelle avec les cordes de l'orchestre est semblable aux pleurs des gens. C'est un moment déchirant. Le troisième mouvement nous entraîne vers la nature, les chants d'oiseaux avec l'idée qu'il ne faut jamais renoncer à la beauté. Je tiens beaucoup à cette oeuvre qui a un impact particulier sur le public lorsque je la joue sur scène. Elle parle de notre temps. C'est assez rare en musique classique où l'on joue souvent des oeuvres créant l'émotion mais datant de plusieurs siècles.
Quand avez vous commencé la conception de l'album qui passe de l'ombre à la lumière débutant par le Kaddish, la prière pour les morts et finissant par la Liste de Schindler de John Williams ?
Il y a deux ans. On consomme aujourd'hui la musique souvent en streaming mais le disque a encore, à mon avis, sa valeur et un sens dans la manière dont un artiste en conçoit le chemin. J'aime entraîner les gens dans un voyage intérieur avec le violoncelle qui emmène vers l'espoir. Je suis fascinée par la voix. Je veux que mon violoncelle soit comme ma voix et pas seulement des notes mais que les sons chantent, racontent, murmurent et vivent au delà de la mélodie. J'ai choisi des airs qui étaient en lien pour leur spiritualité et apportaient à l'auditeur, un sentiment d'élévation.
En solo ou au milieu d'un orchestre , vous semblez parfaitement seule au monde et en harmonie comme dans une histoire intérieure...
Lorsque je suis sur scène, j'ai le sentiment de devenir l'oeuvre que j'interprète un peu comme un acteur devient son personnage. Après des mois de travail, le jour du concert, cela peut donner l'impression que je m'oublie mais je suis un peu comme une passeuse de musique, dans ma bulle, même si elle me permet aussi d'être dans une communion absolue avec les autres musiciens et le public. Cet état, je ne parviens pas à l'avoir sans public. Un moment magique se crée. Je ressens que les gens sont là pour recevoir.
Jouer avec un public et un orchestre c'est un partage, comment vivez vous cette période si singulière pour les artistes ?
C'est un moment très difficile car mon essence même est la scène, un partage et une communication. Je suis depuis 15 ans sur la route et voyage sans cesse. C'est un travail d'athlète de haut niveau, très régulier; je ne pars jamais en vacances. Tout s'est interrompu brutalement. Mais j'ai réalisé que lorsque j'offre la musique aux gens, elle me sauve aussi et m'est foncièrement vitale. Les réseaux sociaux ont permis de garder le lien avec le public de façon émouvante mais rien ne remplace la véritable communion de la scène. La grande leçon de cette période est que le monde a besoin de solidarité. On ne peut plus se parler, s'embrasser, se toucher et cela manque atrocement.
La musique est-elle médiatrice, selon vous ?
Pour moi, la musique est communication, un langage d'émotions universelles. Elle est ambassadrice de la beauté, d'espoir. C'est pourquoi, les artistes ont un rôle important dans la société.
Une part des bénéfices de votre album sera reversée à l'Unicef. En quoi est-ce important de vous associer à cet organisme international ?
J'ai toujours été engagée dans des oeuvres caritatives et j'ai voulu qu'avec cet album, les notes et les mots soient des actes concrets. J'ai pensé à l'Unicef car pour moi l'espoir, c'est l'enfance et l'éducation. Ce disque est un projet de vie. J'aimerais créer avec l'Unicef un partenariat éducatif.
Pour retrouver Camille Thomas et les dates de ses concerts à venir... à Tokyo dès le 22 août et dans le courant de l'été avec le chef d'orchestre Mathieu Herzog, rendez-vous sur son site.
En savoir plus
Camille Thomas a commencé l'étude du violoncelle à quatre ans. Une maman pianiste et artiste peintre sous le nom d'Isabelle Declève, une soeur violoniste: "On a écouté différents instruments et j'ai tout de suite été séduite par le son du violoncelle raconte Camille Thomas. J'ai tout de suite voulu devenir violoncelliste. Comme une évidence."
Marie-Hélène Abrond
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