Indomptable Emile Zola à la Contrescarpe !

Le Théâtre de la Contrescarpe fait salle comble. A l'affiche, deux comédiens talentueux et captivants: Pierre Azéma, dans le costume d'Emile Zola et Bruno Paviot dans celui de Léon Daudet pour cette pièce très réussie signée et mise en scène par Didier Caron.

Zola l'infréquentable, c'est l'écrivain, qui, en 1895, est haï par une partie de la société française pour élever la voix afin de défendre le capitaine Dreyfus, injustement dégradé et condamné à la déportation pour espionnage et haute trahison à l'ile du Diable. Une affaire révélatrice de la société du 19ème siècle qui voyait une montée inexorable de l'antisémitisme. Dreyfusards et antidreyfusards s'opposent violemment. 

C'est tout l'enjeu de cet échange savamment construit par Didier Caron qui nous transporte au coeur d'une époque  en pleine mutation.

Alors qu'Emile Zola devient infréquentable pour prendre la défense de Dreyfus, il devient aussi un Zola indomptable qui va utiliser sa plume pour dénoncer l'inacceptable injustice. Celui qui affirmait ne pas passer un jour sans écrire une ligne va donc s'opposer, au cours de la pièce, dans une joute verbale à Léon Daudet, fils de son ami Alphonse dont il avait fait un vibrant éloge funèbre à sa disparition. Léon est journaliste et assiste à la dégradation de Dreyfus qu'il commente: "Il est couleur traître".

"Vous êtes pétri de haine" lui lance Zola révolté tandis que Daudet lui assène: "Par la profondeur de vos racines, vous n'êtes pas français", lui rappelant ses origines italiennes. Alors que le Figaro bloque les articles de Zola, l'auteur avoue sa profonde solitude à Jeanne: "Je n'ai qu'un seul amour dans la vie, la vérité". Cette vérité, l'auteur des célèbres Rougon-Macquart l'affirme: "Lorsqu'on l'enferme sous terre et qu'un jour elle éclate, elle fait tout exploser". 

C'est L'Aurore qui accueille les lignes de la célèbre lettre adressée à Monsieur le Président de la République : 4570 mots pour un texte, "J'accuse" publié en 1898 qui résonne comme un cri et lui valut condamnation. "La vérité est en marche et rien ne l'arrêtera." Une vérité que l'auteur paiera de sa vie quelques années plus tard. 

"Zola l'infréquentable" est une grande pièce jouée dans une petite salle. Le jeu des comédiens y est exceptionnel, vibrant et sincère. Ne la manquez pas !

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Marie-Hélène Abrond

Publié le 25 novembre 2022

 

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