Miloš Karadagli?   est présenté par le « Sunday Times » comme le guitariste "le plus populaire au monde". De passage à Paris pour présenter son nouvel album « The Sound of silence », très original dans ses adaptations (Decca), il fait son grand retour après deux ans d'absence.  Nous l’avons rencontré, à la veille d’une tournée au Royaume-Uni, aux Etats-Unis, en Asie. Celui qui aime dire que "c'est la guitare qui l'a choisie et non l'inverse" s’est prêté au jeu des questions/réponses… en anglais et nous dit tout !

Né au Montenegro, Miloš a commencé à jouer de la guitare à 8 ans et est arrivé à 16 ans à Londres pour étudier à la Royal Academy of Music. Une forte volonté, une passion intense pour la musique l’ont conduit sur les grandes scènes internationales… jusqu’au jour où, il ne réussit plus à jouer une note.

Vous êtes à Paris pour présenter « The Sound of silence », votre nouvel album. Comment allez-vous ?

Je ne me suis jamais senti aussi bien après avoir vécu une période difficile de deux ans. Ne pas pouvoir respecter mes engagements alors que j’étais attendu sur scène dans le monde entier a été compliqué à vivre. Je ne savais pas ce qui se passait alors que j’étais en plein succès. Ma main était devenue étrange, comme bloquée. Je ne pouvais plus jouer.

J’ai lu que vous aviez fait une sorte de burn-out ?

Je ne m’en suis pas rendu compte immédiatement. Je suis une personne ouverte, pas dépressive, claire dans mon esprit et travaillant dur. Les médecins ne comprenaient pas ce qui se passait et n’avaient pas de solution pour moi. En fait, ce n’était pas médical mais d’ordre émotionnel. C’est incroyable de voir le pouvoir de l’esprit sur le corps. Lorsque j’ai compris que je risquais de ne plus jamais jouer, j’ai compris que j’avais travaillé trop dur, et n’avais plus de temps pour me ressourcer dans mon art.

Qu’est-ce que cette épreuve vous a appris ?

A devenir une personne beaucoup plus généreuse, avec l’envie de remercier pour le plus beau cadeau que m’a fait la vie : la musique. Pour jouer, vous avez besoin d’être connecté au plus profond de vous-même. Et pour trouver la partie la plus profonde de votre être, vous avez besoin de paix et de silence. J’ai appris une chose : la musique vient d’abord et c’est le plus précieux. J’adore jouer en concert mais il est important de garder un équilibre entre l’artiste et la pression d’une carrière.

Aujourd’hui, vous êtes de retour avec « The sound of silence », le titre de votre nouvel album qui est celui d’une chanson de Simon et Garfunkel. Est-ce une référence au moment difficile que vous avez vécu ?

A 100%. J’adorais la chanson qui reste dans l’histoire de la musique. Le message c’est mon silence pendant deux ans lorsque je ne pouvais plus jouer. Pendant cette période silencieuse, j’écoutais les autres artistes en concert ou album. Je ressentais, respirais leur musique, comme un retour aux sources avec une telle intensité que je me disais que si j’avais l’opportunité de rejouer, ce serait juste pour l’amour de la musique.

Dans ce nouvel album, il y a l’adaptation de « The book of love » de Peter Gabriel et « Nights in white satin" des Mooddy Blues. Est-ce difficile d’adapter des morceaux de rock à la guitare classique ?

Je ne le pense pas.Le style de mon jeu, ma personnalité et mes goûts musicaux sont forts  et forment une unité qui me permet de m'ouvrir à des mondes différents et de les intégrer dans mon propre monde.  C’est formidable d'avoir l'opportunité de ne pas être lié à un genre unique mais d'expérimenter et être juste un artiste. En fait, je crois qu’on peut adapter toutes les bonnes musiques qu'on aime. 

Vous êtes aussi soucieux de l’éducation musicale des jeunes. Quelles sont vos actions ?

Je soutiens des actions car devenir un musicien dans ce monde est un privilège. La musique a changé ma vie. Je suis triste de voir des enfants qui ne peuvent pas jouer de la musique parce que leurs parents ne sont pas assez riches pour payer des cours. C’est un paradoxe dans les riches pays de l’Ouest que l’accès soit aussi difficile car la musique est un langage compris dans le monde entier. On a besoin de bonne musique. Je mène des actions à Londres, entre autres avec le "London fund for young musicians".  Ces jeunes ont l’opportunité de tomber amoureux de la musique. Mon projet est d’être une sorte d’exemple, d’enseigner parfois, d’apporter mes conseils. Ce que les enfants vous donnent en retour est juste fantastique. J’adore travailler avec eux.

 

Marie-Hélène Abrond

Publié le 7 octobre 2019

 

 

 

 

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