DIM STORY, UNE AVENTURE INDUSTRIELLE ET  HUMAINE

C'est une histoire méconnue du grand public. Pourtant, tout le monde connait la marque DIM qui continue d'enchanter les jambes féminines. Mais l’incroyable aventure industrielle à succès, lancée par son créateur Bernard Giberstein dans les années 50 est restée discrète comme la personnalité de l'homme, sensible Screenshot 20240528 130930 chromeet silencieux qui n'évoquait jamais en famille ou en public, son passé douloureux. C'est ce destin hors du commun que raconte l’un de ses fils, Daniel Giberstein dans un documentaire très émouvant, partagé par la voix avec Francis Huster. Diffusion sur LCP, le 26 juin, à 20h30.

« Le Silence des Tableaux », sous-titre de ce document exceptionnel intitulé Dim Story  nous plonge au cœur de deux périodes de l’Histoire qui ont touché l’Europe, celle de la Seconde guerre mondiale et de la Shoah puis celle des Trente Glorieuses qui a permis l’expansion industrielle de la France et vu l'avènement de la société de consommation.

Au cœur de la première, l’histoire d’un jeune homme et d’une famille. Bernard Giberstein, né en 1916 à Varsovie, avait dû rejoindre la Belgique pour poursuivre des études d’ingénieur agronome alors que les universités étaient interdites aux Juifs polonais. Premier exil et séparation qu’aucun des membres de sa famille ne croit définitive. Un destin néanmoins bouleversé par l’Histoire qui le poursuivra jusqu’à son suicide à 59 ans, après avoir fondé avec succès la société DIM.

Une vie marquée par l’Histoire

Car en 1939, alors qu’il vient d’échouer à ses examens, Bernard ne rentre pas dans son pays mais prépare sa session de rattrapage. L’invasion de la Pologne le fait Screenshot 20240528 131828 chromes’engager dans l’armée polonaise en exil mais devant la capitulation de la France, son bataillon étant proche de la Suisse, il passe la frontière avec ses camarades et se retrouve interné dans un camp. Il décide alors de fuir, repart en France pour entrer en résistance et faire passer en Suisse des familles juives. Arrêté, il échappe, miraculeusement à la mort à plusieurs reprises… mais au retour découvre que toute sa famille a été exterminée.

Comment se reconstruire après-guerre ?  La rencontre avec Sarah, sa future épouse, sera salvatrice.

 

Screenshot 20240528 132150 chrome 2Elle aussi a vécu l’antisémitisme, l’arrestation puis 1455440764068315538l’internement à Drancy.
Plus tard, Daniel, leur fils, apprendra que Sarah, avait été exfiltrée in extremis de la déportation par le médecin Abraham Drucker, le père de Michel. Une histoire incroyable qui a scellé une amitié fraternelle entre les deux hommes.

DIM, une aventure industrielle hors du commun

En quête d’une idée novatrice pour redonner du sens à sa vie et se reconstruire, Bernard Giberstein découvre l’avènement du nylon apparu aux Etats-Unis. C’est alors que naît l’idée de créer des bas baptisés au départ « Bas Dimanche », symbole du  jour où les femmes s’habillent.

Patron audacieux, innovant, à la fois bienveillant et visionnaire, Bernard Giberstein, après avoir installé son entreprise à Troyes quitte la région, touché par l’antisémitisme des concurrents de son secteur d'activité.

C’est en Saône-et-Loire, région alors en crise et très exactement à Autun qu’il se lance définitivement avec l’idée de créer des bas sans couture… chics et pas chers alors que la société française est en plein baby-boom d’après-guerre. Des usines se créent dans toute la France et d’innovations en innovations, Bernard Giberstein s’investit corps et âme dans son travail gardant au cœur l’humanité qui lui avait manqué en temps de guerre, créant du lien social, alignant la rémunération entre hommes et femmes et donnant leur chance à ses personnels de progresser au sein de l’entreprise. 
Ses anciens employés qui témoignent dans ce documentaire nous le rappellent avec émotion.

Screenshot 20240528 131920 chromeSilencieux sur son passé et face aux photos de ses parents sur le mur de l'appartement familial, Bernard Giberstein n'aura jamais confié à ses enfants Daniel et Michel, sa souffrance intérieure permanente qu'il avait réussi à transcender par l'action. Mais comment raconter l'indicible de ses blessures ? Le silence des parents rescapés de la Shoah a traversé la génération des enfants de survivants, coupés de leurs racines.

En dénouant les fils du passé de son père après de Screenshot 20240528 131137 chromenombreuses recherches, Daniel Giberstein nous confie: « Mon père avait l’humilité de ceux qui ne cherchent pas à faire valoir ce qu’ils font. La notoriété ne l’intéressait pas. De ce fait, il n’a pas obtenu de son vivant la reconnaissance qu’il aurait pourtant méritée. »

Un documentaire à ne pas manquer.

Marie-Hélène Abrond

Publié le 2 juin 2024

Ajouter un commentaire