Jo March, la fureur d'être soi

Pour bien débuter l'année, allez au cinéma le 1er janvier découvrir la nouvelle version du roman "Les Quatre filles du Dr March" signée Greta Gerwig et portée par une affiche d'exception: Saïorse Ronan, Emma Watson, Florence Pugh, Eliza Scanlen, Meryl Streep, Louis Garrel et Timothée Chalamet. Un film où la sensibilité féminine, la liberté, la créativité sont développées alors que la société patriarcale du XIXème siècle ne laissait aucun choix aux femmes. Un thème toujours d'actualité sous de nombreux aspects.

Une musique d'Alexandre Desplat, une lumière (Yorick Le Saux) digne des tableaux impressionnistes, à la fois douce, vivante, des décors de Jeff Gonchor et des costumes sompteux de Jacqueline Durran... tous les ingrédients sont là pour faire de cette nouvelle version, un succès. Le scénario, selon le souhait de Greta Gerwig, n'adopte pas, comme les  films précédents, la chronologie du roman de Louisa May Alcott intitulé Little women et publié en 1868. L'histoire, c'est un peu celle de l'auteur, apparaissant sous les traits de Jo March, l'une des filles de la famille. Les parents (lui professeur et elle assistante sociale) sont  adeptes du mouvement transcendantaliste qui promeut, entre autres, la bonté naturelle des humains et l'acceptation de l'identité de chaque individu pour l'accès à une vie heureuse. C'est ainsi que la famille éduque ses filles en pleine Guerre de Sécession.

La volonté de la scénariste a donc été de débuter l'histoire avec la rencontre de l'héroïne Jo March (Saïorse Ronan) qui tente de réussir sa vie d'écrivain par elle-même, envers et contre tout, dans la société américaine du XIXème siècle, dans laquelle seuls les hommes ont droit de cité et les femmes destinées au mariage. Jo est la seconde de quatre soeurs: Meg (Emma Watson), Amy (Florence Pugh), Beth (Eliza Scalen). Jo, rebelle aux conventions d'une vie  tracée d'avance. Sa passion, l'écriture lui fait vivre un feu intérieur, et noircir, jour et nuit  le papier à la vitesse des flots d'une rivière. "On ne peut pas vivre que de livres" lui fait remarquer la cassante et sèche Tante March, incarnée par Meryl Streep. Marmee (Laura Dern), la mère bienveillante, soucieuse du bien-être de ses filles la rassure: "Certaines natures sont trop fières pour plier". Jo l'a compris: la société n'aura aucune pitié pour celle qui veut être à la hauteur des hommes. Soutien de famille dans le besoin, elle écarte le jeune Laurie (Timothée Chalamet) qui aurait aimé l'épouser mais restera son ami fidèle et finira par tomber amoureuse de Friedrich Bhaer (incarné par Louis Garrel). 

La force de cette histoire qui a connu un succès fulgurant dès sa publication en 1889 reste d'actualité. Un thème féministe mais un film qui apporte une analyse fine des ressentis d'enfants et de jeunes filles en devenir, tiraillées entre conventions sociales et leur respect, l'aspiration au développement de leur personnalité, quitte à briser ces conventions, à payer le prix de leurs choix, pour accéder au bonheur d'être soi.

Un film sensible, volontaire empreint d'humanité et porteur d'espoir pour un début d'année.

NDLR : A voir de préférence en version originale sous-titrée.

Marie-Hélène Abrond

Publié le 30 décembre 2019

 

 

 

 

 

 

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