Eugénie Grandet au cinéma
Roman de Balzac publié en 1833, "Eugénie Grandet" est porté au cinéma par Marc Dugain avec Joséphine Japy dans le rôle titre mais aussi Olivier Gourmet, Valérie Bonneton et César Domboy. Les décors naturels et le clair-obscur des scènes plongent instantanément le spectateur dans les provinces de l'époque où les moeurs n'ont pas évolué face à un Paris qui s'encanaille.
Nous sommes en plein XIXème siècle dans la région de Saumur et le coeur du roman de Balzac, au delà du pouvoir de l'argent est bien la condition féminine dans la société de l'époque où le patriarcat et la place de l'homme sont dominants. Eugénie (Joséphine Japy) est la fille unique du Père Grandet (Olivier Gourmet), une fille qu'il faudrait marier mais pour laquelle une dot est nécessaire. Le film s'ouvre sur la confession d'Eugénie à l'église :"Est-ce pêcher d'espérer un grand amour ?"
Au foyer, le Père Grandet décide de tout et pour tout: des affaires, des potentiels bons partis pour sa fille. Mais il veut toujours plus. Les femmes attendent des journées durant entre couture et broderie le retour de l'homme, à la fois père et mari. La vie est réglée comme du papier à musique à horaires fixes pour les repas. La famille vit chichement dans un modeste logis et on pourrait la croire sans fortune. Même le pain est sous clef.
Eugénie fuit dans la mélancolie et rêve du grand amour. La jeune fille voudrait découvrir le monde. "Regarde dehors" lui dit sa mère (Valérie Bonneton) pour la consoler. A quoi la fille répond: "Il ne se passe rien dehors". Eprise de liberté, Eugénie voit l'arrivée de son cousin Charles (César Domboy) comme une fenêtre sur la vie et l'amour. Mais le frère du Père Grandet est sans le sou et a préféré le suicide au déshonneur de la faillite.
"Il a sali le nom de la famille" assène le père d'Eugénie à son neveu. Parti pour les Amériques, laissant la jeune fille, il promet un retour. Elle attendra des années, sous la coupe d'un père avaricieux préférant voir mortes les deux femmes qui partagent sa vie, plutôt que de lâcher un sou. C'est à sa disparition que l'héroïne de ce drame pourra donner libre cours à son existence.
Joséphine Japy dans le rôle d'Eugénie joue juste et porte la grâce sur son visage, offrant une grande sensibilité intérieure à son personnage. Olivier Gourmet, convaincant en père inflexible et affairiste et Valérie Bonneton excellant dans son personnage d'épouse soumise montrent une société où le temps s'écoule lentement pour les femmes sous le joug de l'autorité masculine. En bref, un film sur la condition féminine. Un sujet toujours d'actualité !
Marie-Hélène Abrond
Publié le 6 octobre 2021
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