C'est une langue singulière, riche et méconnue. La réalisatrice Nurith Aviv qui a fait des langues son terrain d'études avec d'autres films, présente au cinéma, Yiddish, le 11 mars. Un documentaire avec le concours de France Télévision et dont on peut supposer qu'il sera diffusé sur l'une des chaînes du service public. Nous l'avons vu en avant-première et allons vous donner quelques clefs pour mieux approcher et comprendre l'histoire de cette langue qui vit un grand renouveau.

Le film de Nurith Aviv n'est pas un film du passé mais un document qui s'ancre à la fois dans le présent et dans des racines historiques. Sept témoignages de jeunes nous invitent à partager leur découverte de la littérature yiddish aux quatre coins de l'Europe et en Israël. Car la langue yiddish est singulière.

"Yiddish",  dans la langue yiddish signifie simplement "juif". C'est au milieu du XVIIème siècle que l'adjectif est devenu le nom d'une langue représentant, depuis le Moyen Age, l'essence de la vie des Juifs ashkhénazes, c'est-à-dire des Juifs vivant à l'est de l'Europe.

Née il y a environ 1000 ans, le berceau de la langue yiddish serait situé dans la région de Rhénanie ou de Bavière et aurait été parlée très tôt en Lorraine. C'était aussi le cas au XVIème siècle, dans le Nord de l'Italie et à Venise.  Et à la veille de la Seconde Guerre mondiale, plus de dix millions de personnes s'exprimaient dans cette langue.

Yiddish berlin

En fait, l'originalité du Yiddish est puisée dans cette mixité culturelle faite d'hébreu, d'araméen et de l'influence des langues germaniques et slaves que les populations ont côtoyées. Ainsi, dès 1534 est imprimé le premier livre, un dictionnaire biblique à Cracovie. Et en 1908, lors d'une conférence linguistique à Czernowitz, aujourd'hui en Ukraine, la langue est reconnue comme l'une des langues nationales juives.

Sa singularité se situe dans une écriture hébraïque mais en la regardant de façon purement phonétique, on constate que la langue orale, la structure des phrases, le vocabulaire sont proches de l'allemand, ce qui n'échappera pas aux germanistes; souvent rejetée pour ses différences, considérée comme une langue essentiellement orale, on a parfois oublié la richesse de sa litterature qui s'est développée. 

Yiddish tel aviv jaffa

C'est bien l'objet du documentaire qui nous intéresse et qui met en exergue l'intérêt des jeunes générations face à cette langue, souvent associée à la Shoah.

"C’est un film sur la poésie yiddish moderne, la poésie d’avant-garde de l’entre-deux-guerres, moment d’un formidable élan créatif de la culture yiddish", précise Nurith Aviv.  Jai eu la grande chance de rencontrer des jeunes gens qui éprouvent une véritable passion pour la poésie yiddish et ils ont bien voulu partager cet amour avec moi. Le yiddish n’est pour aucun d’entre eux la langue maternelle ou une langue entendue à la maison. C’est à un moment de leur vie qu’ils ont rencontré la grande richesse de la littérature yiddish moderne. "

De Berlin à Paris en passant par Varsovie, Vilnius ou Tel Aviv, ces sept jeunes ont donc raconté leur rencontre avec le Yiddish, leur passion pour la langue, sa littérature et sa poésie. "Ecrite avant la Shoah, souligne Nurith Aniv, cette poésie est une proposition de récit au-delà du seul souvenir de la destruction. Une forme de résistance contre les voix de l’intolérance." 

A découvrir dès le 11 mars, au cinéma les 3 Luxembourg, 67, rue Monsieur le Prince - 75006 Paris.

 

Marie-Hélène Abrond

                                                                                                    Publié le 9 février 2020

 

 

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